07/12/2015 Analyse

#Analyse – Après les fausses promesses du big data, place au multi-data

CSA

PAR JEAN-NOËL ZEH, DIRECTEUR SCIENTIFIQUE CHEZ CSA

Jean Noel Zeh 3

Prévoir les comportements d’achat des consommateurs et leurs critères de choix, évaluer l’impact des campagnes de marketing direct heure par heure et les modifier en temps réel ou encore analyser les tendances pour s’assurer de la réussite du lancement de nouveaux services… «tout ceci est possible avec le traitement de volumes importants de données»: voilà ce que le big data nous a promis. Et pourtant, l’enjeu est au-delà du volume! Il est dans la pertinence et la qualité des données.

 

Au big data il convient de préférer le «multi-data sélectif»: c’est-à-dire la capacité de collecter, générer, aspirer de la data choisie car elle est utile. La data (big ou non!) ne doit pas nous envahir. Au contraire, nous devons aller chercher celle qui a un sens et qui permet de mieux répondre à une problématique donnée. Si nous ne savons pas, avant d’intégrer les datas, l’objectif à atteindre, c’est peine perdue.

 

Il est par ailleurs important de s’assurer de la validité d’une information. Un exemple: si en déclaratif le taux d’équipement observé n’est pas le même que celui qui apparait dans la base de données de notre client, quelle donnée croire? Cet exemple illustre le besoin de croiser les sources, de décider de la source fiable, pour s’assurer de la validité de l’information avant de l’analyser et d’en tirer des enseignements.

 

Et puis, si les systèmes d’information internes nous renseignent sur les clients en base, ils ne disent rien sur la situation des clients perdus, des prospects. Disposer de plusieurs sources d’information est donc crucial pour avoir une vision d’un marché dans sa globalité et pour cibler le marché de demain: passer de l’analyse statique à l’analyse prédictive.

 

Si les big data apportent de gros volumes, les enquêtes, elles, fournissent des données structurées, riches et représentatives issues de questionnaires élaborés pour répondre à des problématiques précises. Sans questionnaire comment comprendre les aspirations des consommateurs, comment fixer le prix d’une nouvelle offre, comment construire une stratégie de marque? Si les big data fournissent une photographie de plus en plus détaillée du passé et du présent, seule une enquête permet de se projeter dans le futur. Les deux approches sont complémentaires et s’enrichissent mutuellement.

 

Un modèle prédictif à lui seul ne répondra jamais correctement aux problématiques sans un regard d’expert. C’est cette double compétence d’expertise statistique et de conseil métier qu’il faut valoriser. (…)

 

Un article paru dans la Harvard Business Review récemment et intitulé «Don’t Let Big Data Bury Your Brand» mettait le doigt sur une autre dimension importante. Le big data est traditionnellement utilisé pour des actions à court terme (promotions, campagne média,  programmatic buying…). Il est temps d’utiliser le multi-data (big data, études quantitatives, panel…) pour gérer le capital «marque» en (ré)intégrant les aspirations clients et donc réinvestir le moyen/long terme.

 

Comment expliquer que le secteur historique des études ait perdu beaucoup de temps à appréhender le big data? La réponse est simple: devant la puissance des modélisations (en volume de données) aujourd’hui possible, nous avons voulu voir grand, trop grand, en oubliant de nous poser la question centrale: l’information collectée est-elle pertinente pour répondre à la problématique donnée? La data ne doit pas venir à nous; nous devons aller la chercher, la sélectionner, pour l’intégrer de manière intuitive et empirique: notre rôle est de donner du sens à la data!

 

Aux 4 «V» qui définissent les enjeux du big data  (volume, variété, vitesse, valeur), on pourrait ajouter «validité» (notamment la durée de validité des datas) et «vérité» (quelle vérité nous enseigne le traitement de ces données?). Connaître, créer, croiser, comprendre, conjecturer: voici les 5 «C» du multi-data à mettre en oeuvre dans une quête permanente de pertinence et d’utilité et pour un ciblage fin (scoring et typologie) permettant de réagir en temps réel aux changements de comportement des consommateurs mais aussi dans un souci de pérennisation de la marque.

 

A lire sur Stratégies.fr